dimanche 27 janvier 2008

Out of time, out of focus ?



Un télémétrique, c'est quoi ?

C'est un type d'appareil photo, de format intermédiaire entre ce qu'on appelle les "compacts" et les "réflex". Comme les compacts, il peut parfois tenir dans la poche. Comme les réflex, il est parfois pourvu d'objectifs interchangeables.

Ces appareils ont connu leur apogée dans les années 60 et 70, grâce à des constructeurs dont vous connaissez probablement les noms : Canon, Olympus, Yashica, Nikon, Ricoh, Vivitar, Minolta, Konica...

Le principe de la "visée télémétrique" est très simple : vous regardez dans le viseur. Au centre apparaît un rectangle contrasté (parfois légèrement coloré). Dans cette zone, ce n'est pas une mais deux images qui apparaissent. Pour faire le point, il vous suffit de tourner une bague de l'objectif en faisant en sorte que les deux images, dans ce petit rectangle, coïncident.


Mais le succès des appareils télémétriques n'est pas forcément dans cette visée particulière.


Leur point fort, c'est surtout qu'ils ont été construits à l'époque où la photo argentique arrivait à maturité. En deux mots, les boîtiers sont extrêmement solides et les objectifs ont souvent une qualité d'image époustouflante.

C'était juste avant le règne des appareils à mise au point automatique, c'est-à-dire les appareils compacts que nous avons tous connus dans les années 80 et 90, et qui eux-mêmes ont précédé l'avènement des appareils photo numériques, ou APN.


Alors d'où vient mon intérêt pour ces appareils photo télémétriques ?


C'est très simple. En à peine quatre ans, j'ai possédé trois appareils photo numériques qui m'ont tous déçu. Le dernier d'entre eux était pourtant un appareil haut de gamme produit par Canon, et vanté comme un appareil professionnel. Les images manquaient cruellement de charme, les entrées lumineuses saturaient, les contours et les silhouettes s'entouraient d'un halo rouge, ou bleu, du plus mauvais effet.

Et puis tout était net, bon sang ! Alors que lorsqu'on tire un portrait, si le fond est flou cela fait ressortir le visage au premier plan.

Last but not least, les tirages étaient... fades.

Tous ces défauts ne sont pas difficiles à comprendre : la photo numérique n'en est qu'à ses balbutiements, or l'on nous la vend comme si c'était d'ores et déjà une technologie accomplie. Le numérique arrivera sûrement à maturité, mais... l'argentique ne s'est pas développée en moins de dix ans, vous savez...

Lorsque j'ai commandé puis reçu mon premier appareil télémétrique, au début de ce mois de janvier 2008, j'ai pris l'appareil en main. J'ai compris instantanément le fonctionnement du viseur. J'ai chargé une pellicule. J'ai mitraillé. Quatre ou cinq jours plus tard, je regardais mes premières photos sur l'ordinateur. Il faut être honnête : elles n'étaient pas toutes formidables, mais sur les 36 poses, en proportion, il y en avait quand même beaucoup qui sortaient du lot. Et si je veux des tirages ? J'ai mes négatifs !


Vous croyez peut-être que votre APN a une meilleure qualité d'image qu'un appareil 24x36 standard ?

C'est mathématique. Enfin pas seulement, mais quand même. Pour obtenir l'équivalent d'une image prise avec un appareil argentique pourvu d'un objectif correct, il vous faut un APN à 12 millions de pixels pourvu d'un capteur d'une taille de 24x36mm. Ce qui ne se trouve actuellement que sur des réflex numériques à plus de 1500 euros le boîtier. Sans objectif. Alors, vous avez ça sous la main, vraiment ?


Et puis il y a l'amortissement de votre achat.

Oui, parlons-en ! Tous les partisans de la photo numérique (j'en étais un moi aussi) nous vantent les économies qu'ils vont faire : ils peuvent "shooter" autant qu'ils veulent, puisque le tri est encore possible après, sur l'ordinateur. D'ailleurs, la plupart des utilisateurs d'appareils photo numériques ne font jamais de tirages.

Eh bien calculons. Un appareil photo numérique avec une optique à peu près correcte vaut actuellement 500 euros. Un appareil photo télémétrique en excellent état et pourvu d'une optique parfaite se trouve actuellement aux alentours de 30 à 40 euros. Une pellicule ? 4 €/36 poses. Un développement chez le photographe de quartier ? 3,50 €. Le tirage ? Même tarif (et aussi pitoyable) qu'en numérique.

Autrement dit, avec un appareil photo télémétrique, j'ai le temps de faire une soixantaine de pellicules, soit plus de 2000 photos, avant d'atteindre le coût d'un APN. Ça vous laisse le temps de voir si ça vous convient, non ?


Et puis, dans 4 ou 5 ans, votre APN sera mort, cela ne fait absolument aucun doute (demandez aux vendeurs)... les appareils télémétriques, eux, ont déjà plus de trente ans et tournent comme au premier jour. Dans les mêmes conditions qu'un APN, ils font de bien plus belles photos, et... l'on a même pas encore parlé du PLAISIR !


Ah, les plaisirs de la photo...

Le plaisir de sentir l'odeur de la pellicule, celui de tourner la bague sur l'objectif. De déclencher en entendant ce bruit particulier à chaque appareil (et non pas un bruit de synthèse imitant un déclenchement, beurk !).

Je ne vous parle même pas de tirer vous-mêmes vos photos, parce que je n'ai pas franchi le pas pour ma part.

Je me rends désormais plusieurs fois par semaine chez un artisan photographe qui tient une toute petite boutique en bas de chez moi. On discute. On a l'impression de faire de la résistance. C'est drôle, et puis ça crée du lien social. On ne peut pas vraiment en dire autant de votre logiciel de rangement ou de retouche photo, avouez...


Quoi qu'il en soit, si cet article (de foi) vous a titillé ne serait-ce qu'un instant, faites un petit tour sur le site d'enchères dont vous connaissez bien le nom, jetez un œil, craquez peut-être et... revenez vous plaindre si vous n'êtes pas conquis.


8 commentaires:

MMSG a dit…

Instructif, merci:)

Unknown a dit…

Hmm c'est bien votre côté rebelle, et un peu puriste mais bon, avec tout, tout ça faut avoir le temps, avec le numérique c'est plus rapide.
Je sais, je sais, certains diront il faut le temps, le prendre etc...
Et puis 1 million de pixels de plus ou de moins sur un écran d'ordinateur...
mais en tous les cas ça m'a donné envie de regarder plus avant votre blog ;)

Anonyme a dit…

superbe vitrine ... que d'appareils !!! et des beaux en plus !!! magnifique.

Christophe Pluchon a dit…

Je suis du même avis, bravo ! Arrêtons de suivre bêtement la mode et le progrès, et réfléchissons un peu...
http://christophe-pluchon.over-blog.com/

Anonyme a dit…

Moi aussi j'ai ressorti le vieux Foca*** de mon pere et "craqué" pour un vieux Leica III des années 5O! Ressortie aussi la cellule!Quel plaisir! Fini les records à 500 banales photos par jour! Voici enfin les jours à quatre ou cinq photos pour lesquelles on a pris le temps de réfléchir! Et vivement samedi pour développer le film et regarder tout ça d'oeil critique!

Nicolas a dit…

Bienvenue dans le club. Plus on est foufou et plus on rit. ;)

Anonyme a dit…

bien interessant ce blog que je découvre via aymeric et jp parmentier
il faut que je m'y remette aussi il y a quelque temps que cela me démange !
bravo pour toutes tes infos idées expériences ...!

Rom a dit…

Je n'ai pas tout à fait le même discours mais je penses comme vous.
Quand on me demande Quel est l’intérêt de faire de l'argentique, Je répond qu'il n'y en à aucun si ce n'est le plaisir (je me suis lassé d'expliquer le beauté du grain des couleurs d'une portra etc...).
Ensuite je leur fait mettre l’œil dans mon yashica mat ou mon Bronica et pour eux tout s’éclaire : "J'ai l'impression d'y être".
Le plaisir pour moi est dans la visée et dans la manipulation des caméras. Mon numérique s'ennuie beaucoup en ce moment.
Bravo pour votre blog.
Beaucoup de recherche m’amène ici et je me décide enfin à faire mon petit com'.

http://rohmphoto.wordpress.com/