samedi 31 mars 2012

Bonus ensablé

Vous souvenez-vous de ce billet du 24 décembre ? J'étais allé à Erdeven, dans le Morbihan, voir un cargo qui venait d'échouer sur la grande plage de cette petit commune, après avoir déversé ses réservoirs dans la ria d'Etel...

Depuis longtemps, le bâtiment a été démonté et la dune a dû subir quelques réaménagements, vu les dégâts occasionnés par les machines pour accéder au site.

Je n'y suis pas (encore) retourné, je ne sais même pas s'il y a encore quelque chose à voir, à part l'absence de cargo... Mais je viens de développer il y a quelques jours un autre rouleau du même jour. Il m'en reste encore trois ou quatre dans mes tiroirs, y compris en moyen format.

Ce jour-là en arrivant, je me suis d'abord trompé de plage. Du coup, mes photos commencent par des images de "Kite des sables". Je m'approche des voiles et je rencontre un gars du coin avec qui je commence à échanger. Quelques mots à propos du kite, du site, de l'affluence des curieux... et du cargo évidemment. C'est lui qui m'indique que le bateau se trouve quelque deux ou trois kilomètres plus loin, derrière la pointe. Il est intrigué par le Leica et moi, comme un touriste l'hiver, je suis venu en chaussures de ville.



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jeudi 29 mars 2012

Une promenade

Les beaux jours sont de retour, j'ai envie d'optimiser mon temps libre pour marcher, photographier, traîner un peu. Quand il fait beau, le Breton sort de sa coquille. Vendredi dernier, j'ai retrouvé Loïc à Nantes pour une déambulation au M6 et Konica Auto S1.6. Un petit resto, une ou deux emplettes, un rouleau de film Agfa.

Voici quelques images de cette promenade, pour le simple plaisir de les partager. Pas la peine de se prendre au sérieux, de se croire en reportage, investi d'une mission. C'est juste : se tenir disponible, concentré, s'appliquer à rester spontané. Petite discipline qui ne vaut que pour moi, car je ne prétends pas mieux savoir ni mieux faire. Mais Ronis, Boubat, Larrain ont déjà expliqué tout ça : tourner autour du sujet, attendre que les choses se mettent en place, essayer de remplir le rectangle.

J'ajouterais qu'il faut savoir le faire et le refaire sans que cela soit un labeur, et simplement recommencer avec la même énergie ces quelques pas de danse, « with pleasure »...



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Même s'ils n'ont pas toujours le choix, merci à tous les passants qui se laissent photographier (presque) sans sourciller. C'est grâce à eux aussi que le plaisir est toujours là.

dimanche 25 mars 2012

La vie en mars

Le mois de mars, du froid glacial des petites matinées au chaud printemps qui s'installe. La météo nous promet des températures estivales, le ciel est uniformément bleu. Il y a des bateaux en partance pour le Mexique et un gros immeuble couché qui n'en finit pas de s'achever.

C'est le mois de mars à Saint-Nazaire et dans pas mal d'autres endroits aussi. Au bout de la rue, des tractopelles ont redessiné la plage, j'ai croisé des danseuses tahitiennes devant une agence de voyage. Le jeudi, je prends un sandwich "sud-ouest" près du Paquebot ; d'autres fois, des mets africains et des "bonbons piment" rue de la Paix.

J'ai vu un documentaire de Depardon sur les paysans, très bien. Puis un film du même sur une femme en Afrique, assez mauvais : des plans trop longs, du bavardage, beaucoup de complaisance. L'image mobile qui se prend pour une image fixe et qui n'est tout au mieux qu'une image figée ; cinq minutes de film en couleurs et de sons ne valent pas une photo monochrome.

D'ailleurs, je me dis souvent qu'il n'y a pas un sujet qui se prête à la photo et un autre qui ne s'y prête pas : il n'y a que la photographie, qui est son propre objet, son propre but. Le départ d'une course m'intéresse très très peu, mais profiter d'une lumière intéressante pour essayer de faire une image, tourner autour d'une image, essayer de cueillir une image, se laisser surprendre... oui, ça m'intéresse indiciblement. 


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vendredi 9 mars 2012

De l'exotisme

Combien d'entre vous collectionnent les appareils photo et voient du même coup leur budget de voyages se réduire comme peau de chagrin ? Ça a été mon cas jusque récemment, mais je me soigne. Depuis septembre, j'ai revendu à peu près les deux tiers de mon matériel. Certains lecteurs associent mes photos à tel ou tel appareil : ils seront surpris d'apprendre que je n'ai plus de Rittreck ni de Bronica, plus d'Hexar ni de Zeiss Ikon, plus de reflex 24x36 d'aucune marque, plus de compact... j'ai même fait le vide d'absolument tous mes films négatifs couleurs.


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Est-ce qu'en ayant consenti cet effort, je peux me permettre un tour du monde ? Pas vraiment... mais mes étagères sont plus légères, et mon esprit aussi. Je sens que j'évolue vers une sorte d'ascèse non seulement dans mon rapport matérialiste à la photo, mais aussi dans la façon dont je prends/construis/découvre des photos. Je m'efforce de laisser venir les choses, de ne pas chercher à faire une image, de ne pas chercher tout court. Jusqu'ici j'avais toujours pensé que la citation de Picasso était prétentieuse, mais finalement elle peut tout aussi bien être humble :

« Je ne cherche pas : je trouve. »

Je ne sais plus quel photographe a écrit qu'il n'y a pas besoin de partir plus loin que le coin de la rue pour faire une bonne photo, mais c'est vrai. Je ne fais pas souvent une bonne photo, mais j'arrive à photographier assez simplement et à me satisfaire de quelques photos correctes de-ci de-là. Dans l'acte photographique, je suis moins frustré qu'il y a quatre ans.


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On demande à Henri Cartier-Bresson, vers la fin de sa vie (au moment où il dessinait, ayant abandonné la photo) si on peut apprendre à regarder, et lui de répondre « Est-ce qu'on apprend à baiser ? » avant de suggérer d'aller au Louvre admirer les toiles de Rubens, qui apprennent à regarder car elles sont magnifiquement composées et qui donnent aussi envie d'amour. Pas seulement d'amour physique, mais d'amour. Est-ce que Cartier-Bresson ne parle d'amour que pour parler d'harmonie ? Je ne crois pas. Car un peu plus loin, il dit que son plus grand plaisir dans la photo, c'était le tir photographique : le(s) moment(s) où l'on appuie sur le déclencheur.


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Il paraît que les adeptes de la course à pieds produisent des endorphines en courant, et que cela provoque en eux une accoutumance comme le ferait la morphine. De la même manière, je ressens le besoin de déclencher chaque jour, et une certaine frustration les jours où je ne déclenche pas, ou pas bien. C'est une petite frustration que j'ai appris à gérer, à faire taire si besoin, mais elle est là, elle grossit quand même d'heure en heure, me donne mauvaise conscience si je ne sors pas de tout le jour.


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Alors je désacralise l'acte du déclenchement. Non pas pour le banaliser ni le rendre anodin, surtout pas. Mais dans l'idée de faire mes gammes : on ne joue pas un concert sur scène tous les soirs. Pour cela, rien de mieux que le coin de ma rue, que les recoins de ma ville.


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J'invite deux amis rennais pour le week-end, on mange, on boit, on rit et on discute. Et puis on marche trois heures autour du bassin, à deux pas d'ici. Je gribouille trois pellicules de 36 poses Agfa sous un soleil très dur, je me fatigue les pieds, les genoux, le visage. Les mains fonctionnent encore mais les yeux ne voient plus. On rentre et quelques temps après, on découvre ce qu'on a pris dans les filets. Oh rien de très intéressant en soi, mais c'est toujours la même histoire : fixer un peu de lumière sur quelques sels d'argent.



 
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Combien de photographes aventuriers, de globe-trotters aveugles ? Cartier-Bresson disait que les voyages l'ennuyaient : ce qu'il aimait c'était s'arrêter dans un pays pour l'observer. Le seul et unique voyage à ne pas laisser passer, c'est celui qu'on fait en soi-même.


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