mercredi 9 novembre 2011

Ballet

Jonathan Hillhouse.
Je veux vous parler d'un photographe que j'ai déjà cité sur ce blog : il s'agit de Jonathan Hillhouse. Sujet britannique, il vit au Japon depuis plusieurs années. Il a une trentaine d'années et il est passionné de photo argentique. Lorsque j'ai découvert ses photos, au départ, c'étaient surtout des objets abandonnés, des lieux vides, des détails photographiés en diapo couleurs au Norita 66. Depuis, Jonathan a beaucoup utilisé un Mamiya Universal Press en format 6x9, puis un Speed Graphic en grand format, puis un Leica M4 équipé d'un M-Summaron 35mm f/2.8. C'est quelque part au milieu de tout ça, au gré des portraits de son amie et des photos d'enfants, d'amis, de passants que le noir et blanc est apparu.


Plus d'humain.
Jonathan introduit aujourd'hui de plus en plus souvent des personnes dans ses photos. Discipline moins esthète qu'à l'époque du Norita 66 (qui a cassé), mais plus ardue aussi. Ceux qui se focalisent comme moi sur la photo dite "humaniste", la photo qui met en avant l'humain, savent qu'il y a énormément de clichés perdus pour une bonne image. Et encore, même lorsque l'image est bonne... il y a toujours quelque chose qui ne va pas. Heureusement. Il n'empêche : si j'écrivais fin 2009 que Jonathan savait retranscrire le meilleur d'une situation, d'une atmosphère, je pourrais dire aujourd'hui qu'il est au meilleur de son art. Il a réussi à atteindre un équilibre fragile, une nuance qui touche à l'humain tout en effleurant l'esthétisme, à moins que ce ne soit l'inverse.


Fiche technique et réalisation.
Sa dernière série de photos noir et blanc, "Ballet", a été réalisée avec son fidèle système Olympus OM, un objectif standard 55mm f/1.2 (pas particulièrement piqué mais un peu plus "long" qu'un vrai standard) et une rareté de collectionneur, un grand angle modéré qui est en même temps un standard passe-partout : le Zuiko 40mm f/2. Le choix de la pellicule nous renvoie à la désuétude de notre pratique de photographe amateur puisqu'il s'agit d'un film récemment arrêté : la Neopan 1600.

Ces données techniques sont importantes à mes yeux car je connais plutôt bien le travail de Jonathan depuis plus de trois ans, et je peux évaluer l'importance de ses choix matériels et deviner les raisons qui orientent ces choix. Mais au-delà de ces considérations de spécialistes, de photogeek pourriez-vous dire, Jonathan Hillhouse dépasse, transcende l'outil et la méthode et s'efface. Il nous donne directement à voir ces jeunes danseuses qui rappellent bien sûr celles de Degas. L'ensemble m'a fait penser aussi à la série "Cadets Coulisses" de Sylvain Demange mais Jonathan approche ses danseuses de façon plus douce, plus délicate ; moins à la manière d'un reporter qui va au-devant de son sujet pour chercher la meilleure composition, l'angle original que comme un œil invisible et attentif, l'œil des coulisses. Il saisit ses sujets dans des rais de lumière, des découpes sur fond noir où le noir du plateau comme le blanc des tutus gardent toujours de la matière, jamais contrastés à l'excès.


Humaniste.
Dans ces quelques images, Jonathan réapparaît dans tous les aspects de sa personnalité d'artiste : celle de l'esthète, celle de l'amateur d'art, celle de l'artisan qui sculpte les nuances de gris comme un matériau avec lequel il s'est confronté durant plusieurs mois avant d'en tirer la quintessence, celle du sociologue qui nous documente la vie au Japon à travers les yeux d'un Européen, celle du portraitiste* ou du photographe humaniste qui est apparu au fil du temps derrière toutes les autres identités évoquées ci-dessus.

"Ballet" de Jonathan Hillhouse est visible ICI.
*A propos de portrait et de danse, vous pouvez revoir deux très belles séries d'Alexandre Maller par .

1 commentaire:

Ivan a dit…

Merci pour la découverte, je ne le connaissais pas du tout !

Plus que la série Ballet, je trouve que les photos de rue désertes sont top.