vendredi 24 février 2012

Ecrit à Quimper

Je suis à Quimper depuis quelques jours. Pas de travail dans mes bagages, j'ai l'esprit oisif et le corps paresseux. Pour une fois que je suis ici à cette date, j'aurais voulu photographier les gras à Douarnenez. Mais le temps n'a pas suivi et le bouquet final a eu lieu sous la pluie. Ce billet a failli s'intituler "Pétard mouillé"...


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Mais je suis allé me promener à Bénodet. Bonne idée. J'ai aussi partagé avec Richard une bière aux fruits rouges à "La Trinquette" du Guilvinec. Ambiance foot à la télé et pilier de comptoir alcoolisé. Je lui parle de Bénodet, il s'étonne que je ne sois pas plutôt allé à Sainte-Marine. Oui mais... de Sainte-Marine on voit Bénodet, de Bénodet on voit Sainte-Marine. Bénodet, donc. 


J'utilise un "nouveau" boîtier depuis quelques jours : un Konica Auto S1.6, télémétrique 24x36 tout mécanique, optique en 6 éléments et 4 groupes (formule Planar !!) : un Hexanon 45mm f/1.6. En recevant l'appareil au début du mois, j'avais eu la mauvaise surprise de trouver un viseur brumeux, presque opaque, inutilisable. J'ai pris mon courage (ou mon inconscience) à deux mains et j'ai décidé de démonter le capot de l'appareil. Gloups. Nettoyage du viseur, changement des mousses d'étanchéité sous le capot et dans le dos. J'ai même acheté une pile PX625 et constaté que la cellule fonctionnait parfaitement. En bref, j'ai trouvé un petit frère au Konica IIIM. Je fais des photos de rien.


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Bénodet : une heure et demi devant moi, aller/retour compris. Konica Auto S1.6 : une Tri-X. Konica IIIM : une Plus-X, une PanF. Minolta Autocord : la fin d'un rouleau inversible de Kodak EPP dans la pénombre d'une petite chapelle. On verra le résultat, mais ça fait du bien de déclencher.

« C'est plus fort que moi, il faut que j'aie l'impression d'avoir fait quelques photographies aujourd'hui. Une journée sans images est une journée morte. »

— Raymond Depardon, in Paris Journal,
(ici sous une image de 1997)
Hazan 2004, p. 260


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Les jours gris, je lis des livres de photographie. Ça fait écarquiller les yeux de mes élèves, cette idée de lire un livre d'images : ils ont l'impression que je triche. J'avais un peu oublié Raymond Depardon depuis deux ans ; je viens de relire Paris Journal et suis plongé dans Voyages. L'écriture de Depardon est plus dépouillée mais tout aussi juste que celle de Janine Nièpce. La plupart de ses photos sont incroyables et magnifiquement construites. L'editing est par contre assez contestable. C'est le contre principe du moment décisif : je comprends bien la démarche, mais le résultat ne mérite pas toujours un agrandissement pleine page...

La photographie se doit d'être une obsession. Elle est de cet ordre là pour moi. Richard me dit avoir déclenché 150 fois sur son Leica M8 depuis l'été dernier. J'ai déclenché 150 fois à Bénodet en une heure de promenade. Vous connaissez probablement cette citation de Depardon, mais elle est rarement citée en entier :

« Jamais ne s'arrête l'idée d'une photographie, d'une image à faire, la mémoire d'une lumière, la surprise d'un cadre, jamais de repos pour la quête d'un bonheur photographique. »

— Raymond Depardon, in Paris Journal,
(ici sous une image de 1985)
Hazan 2004, p. 92


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J'ai finalement revendu le Rittreck 6x6. Ça m'a permis de résorber mon découvert et de me faire plaisir : je suis tombé à Quimper sur un exemplaire unique, couvert, des Planches-contacts de Magnum : 100 euros, je le savais... j'ai hésité... je suis retourné en catastrophe à la librairie, comme une urgence, courant sous la pluie à 18H45. J'ai eu le temps d'attraper aussi un roman qui me tentait, un album de jazz, un film de Depardon.

« Magnum est ma troisième agence et la dernière j'espère ! Aujourd'hui, c'est une banque d'images informatisées, tous les jours, des photographies sont scannées, archivées, distribuées... Nous sommes déchargés des ventes à la presse et à l'édition. Mais c'est aussi un groupe de photographes amis avec chacun sa personnalité, ses obsessions et ses désirs. La plupart ce sont des amis, les autres je ne les connais pas bien. Nous faisons la route ensemble et surtout nous avons notre mot à dire sur l'avenir de notre travail. C'est le prix à payer pour la liberté.
Les statuts de l'agence Magnum sont tout à la fois remarquables, rigoureux et ouverts. On dit qu'ils sont été écrits par David Seymour, un Hongrois, à New York, en 1947. Ils sont d'une grande intelligence : liberté et contrainte du photographe, tout un chapitre ! »

— Raymond Depardon, in Paris Journal,
(ici sous une image de 1998)
Hazan 2004, p. 306


Dans le grand volume de plus de 500 pages, des planches, des mots et des agrandissements de Henri Cartier-Bresson, Robert Capa, David Seymour, Eve Arnold, Werner Bischof, Elliott Erwitt, Guy Le Querrec, Marc Riboud, Cornell Capa et de nombreux autres, par ordre chronologique de 1933 à 2010... Pas une page sur Sergio Larrain, hélas. Mais ce livre est un festin pour les yeux et l'esprit. Attention à l'indigestion ! Je dévore et savoure des pleines pages de films Agfa (Cartier-Bresson en Espagne dans les années 1930), de Plus-X et de Tri-X, d'Ilford "Hypersensitive" HP3. Un monde disparu dont les images vives vous sautent au visage.


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« La planche de contacts, c'est un peu le livre des psychanalystes. C'est aussi une sorte de sismographe qui enregistre l'instant. Tout est écrit. Ce qui nous a surpris, ce qu'on a attrapé au vol, ce qu'on a raté, ce qui a disparu ou un événement qui se développe jusqu'à l'image qui est un épanouissement. »
Et aussi : « Sortir une bonne photo d'une planche de contacts, c'est comme descendre à la cave et en remonter une bonne bouteille à partager. »

— Henri Cartier-Bresson, in Magnum Planches-contacts,
(ici en vis-à-vis du reportage à Séville en 1933)
La Martinière 2011, p. 18


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Note pour la sauvegarde de mes après-midi(s) : il faut que j'arrête ces petits billets en vrac. On ne dirait pas comme ça, mais ce sont les plus longs et les plus fastidieux à écrire, puis à éditer...

lundi 20 février 2012

Flou

Je viens de développer un rouleau exposé en juin dernier au Hellfest. Je profite de l'occasion pour me régaler les yeux une dernière fois : entre f/2.8 et f/4 le Rittreck m'a toujours étonné...


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Un autre étonnement, aussi : celui de ces quelques portraits "à la volée". Les souvenirs que j'ai de ce festival ont en grande partie fondu dans le flou, comme les arrière-plans dans ces quelques images dont la profondeur de champ est volontairement très faible.

mardi 14 février 2012

Rittreck 6x6 à vendre

Cet appareil est une vraie boîte magique à produire des portraits. Avec son optique ouvrant à f/2 sur du négatif au format 6x6, c'est un engin unique en son genre.



J'ai beaucoup investi dans la remise en état de ce Rittreck, j'ai patienté deux ans avant de pouvoir l'utiliser, mais voilà... lorsqu'il est revenu, j'avais déjà commencé à me recentrer sur le format 24x36. Je l'ai utilisé occasionnellement depuis un an : une série au Hellfest 2011, quelques portraits dans la rue, des photos de boîtiers en mode macro.

Ça me crève le cœur, mais je dois le revendre pour des raisons économiques... 
:(

mercredi 8 février 2012

Décès de Sergio Larrain

Après Eve Arnold le mois dernier, un autre photographe de l'agence Magnum vient de s'éteindre : Sergio Larrain, un photographe chilien, autodidacte et talentueux, auteur de deux livres devenus mythiques : Le Rectangle dans la main et Valparaiso.

Son portfolio sur le site de Magnum.
Sa biographie, même source.
Une galerie d'images ICI.
Un article ici, un autre ici et encore un autre .

A cette heure, les grands médias du web n'ont pas encore relayé l'information*. Le feront-ils ? Sergio Larrain n'a plus montré ses photos depuis des dizaines d'années et son travail n'est apprécié que dans un cercle d'amateurs relativement confidentiel.

Cela n'enlève rien au fait qu'il a pu produire de superbes images du Chili. Henri Cartier-Bresson l'avait pris sous son aile en lui donnant les moyens d'explorer d'autres régions du monde, en particulier l'Europe dès 1958. Il l'avait introduit chez Magnum et lui avait procuré son premier Leica M.

* Vingt-deux heures plus tard très exactement, je trouve seulement deux  réactions significatives : celle de la revue "Connaissance des Arts" et celle du supplément "Next" de Libération. A quand "Le Monde", "Libé" (le quotidien), "6 mois" ou "Polka" ?

vendredi 3 février 2012

La Fontaine aux Bretons

Janvier 2012. Une journée ensoleillée comme aujourd'hui. Bord de mer. Froid piquant, les doigts endoloris, les mains sèches. Craquelures de la peau qui saigne, nez qui coule, buée. Avant de faire le grand ménage dans mon matériel photo, j'ai voulu je ne sais pourquoi essayer quelques uns des petits télémétriques à optique fixe que je connaissais de nom. Façon de revenir aux origines de ce blog et à l'un de mes premiers articles sur le Canonet G-III QL17.

J'ai commencé par Minolta. Je voulais continuer par Olympus puis par Konica, mais ça reste à voir. Ici donc le Minolta Hi-Matic 7SII, un appareil qui tient dans une poche de blouson. Excellente optique Rokkor 40mm f/1.7 : faire la différence en termes de qualité avec un Sonnar sur un M relève du coupage de cheveux en 64bits. La cellule est d'une justesse incroyable : priorité vitesse, ouverture automatique, aucune question à se poser si vous n'avez pas envie de vous poser de questions. Le viseur par contre est teinté, étriqué, peu clair et les indications peu lisibles par manque de contraste.

Quoi qu'il en soit...

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à f/2.8, exposition automatique



à f/1.7, exposition manuelle