Le port de Brest avait en 1999-2001 une ambiance de polar brumeux. J'y ai utilisé mes premières pellicules de Kodak Tri-X, mon premier reflex (Canon 500N + 50mm/1.8) et j'y ai vidé quelques films Super 8.
Retourner à Brest, c'est une évidence. Le port a beaucoup changé. Aujourd'hui les bureaux carrés remplacent les vieux hangars et l'enrobé frais coule à flots. Sur les quelques vieux murs encore debout on peut voir de nombreux grafs.
J'admire souvent les graffiti. Je me souviens lorsque Jack Lang, alors Ministre de la Culture de François Mitterrand, les a fait entrer parmi les multiples formes d'expression artistique.
Mais photographier les grafs, c'est assez insatisfaisant. J'étais content qu'il y ait une rencontre humaine au bout de cette déambulation sur le port de commerce.
« Quand j'ai travaillé pour Libération à New York, au début je suivais les photographes du New York Times qui allaient faire des reportages. Comme si j'avais encore besoin d'être dans le journalisme pour pouvoir faire ma photographie. La chance a voulu que je me fasse renvoyer du New York Times et j'ai été obligé de photographier des choses dans la rue, sans aucune contrainte.
Avec l'errance, j'ai rencontré le même phénomène dans un certain sens : elle m'a détaché d'une certaine photographie humanitaire, que nous faisons tous, en couleur ou en noir et blanc : on voit quelqu'un, on va le photographier, on se présente, on lui parle, quelqu'un passe en bicyclette, peu importe. J'étais encore très marqué par cette photo ; je faisais des photos encore très proches des gens, proches des hommes. Même dans mon errance quelquefois, j'avais encore le réflexe de prendre une silhouette qui passe. Cette espèce de déformation, comme s'il fallait se rassurer par la présence humaine sur une photo. Et je me suis libéré. »
Raymond Depardon, Errances, éd. Points Seuil, p. 169
1 commentaire:
D'excellentes photos de Brest se trouvent par ici : Brest, vues particulières
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