J'ai commencé par suivre assez mollement les manifs contre la réforme des retraites. J'étais dans le cortège au printemps, j'y étais encore en septembre mais je me sentais assez peu concerné. Au sens photographique, pas impliqué dans le sujet.
Jusqu'au moment où la rue a commencé à se radicaliser, en bas de chez moi. Un soir, j'arrive pour rejoindre le cortège en fin de parcours mais je m'aperçois qu'il s'est déjà dissipé. Un vague mouvement de plusieurs petits groupes de personnes semble se diriger vers le front de mer. En arrivant aux abords de la préfecture, je constate qu'autour de moi tout le monde s'arrête là, sous les chênes, et se met à attendre.
Jusqu'au premier jet de bouteille de bière, auquel répond le premier jet de lacrymo. Et c'est parti pour l'affrontement. 100 civils contre 100 gendarmes.
Ce soir-là, je me prends des débris de verre sur la tête et je vais au contact. Je rentre dans le sujet, et le sujet n'est pas loin de me rentrer dedans.
Depuis, le déclencheur s'est assoupli. Tellement, à vrai dire, qu'une vis a sauté dans le dos de mon Bronica : ça tournait trop vite, il faisait trop chaud.
Les gars du service propreté ont mis le feu au bitume après avoir allongé une trentaine de poubelles en travers d'un des principaux axes du centre-ville. Un peu plus tard, je rejoins la raffinerie de Donges...
Blocage reconductible. Avant l'aube, le Préfet choisit 4 ou 5 noms parmi ceux désignés par les gérants de la raffinerie. Des gendarmes sont envoyés pour réquisitionner les types chez eux, à 6H du matin. Menace (devant les enfants) : 6 mois d'emprisonnement et 10 000 euros d'amende.
De 7H à 8H, toutes les radios annoncent que la raffinerie est débloquée. A 9H, les grévistes reprennent le blocus du site pour toute la journée. Avant le J.T. de 20H, le programme de télé-réalité peut reprendre : les C.R.S. donnent l'assaut.
Mais c'est pas fini tant que c'est pas fini.